Question orale au Ministre-Président Di Rupo

M. Bierin (Ecolo).

Monsieur le Ministre-Président, la Pologne et l’Espagne ont entamé une procédure pour se retirer du Traité sur la Charte de l’énergie, tandis que les Pays-Bas et la France ont annoncé leur intention de le faire. En avril, les experts du GIEC, dans leur dernier rapport, insistaient encore sur les effets néfastes de ce traité pour le climat. En Belgique, les ministres fédérales, Tine Van der Straeten et Zakia Khattabi, plaident pour que notre pays se retire également du TCE, idéalement via un retrait coordonné de l’ensemble des États membres de l’Union européenne.

Quelle position avez-vous défendue sur le sujet lors des concertations intrabelges ?

Quelles actions le Gouvernement wallon a-t-il entrepris afin de sortir de ce traité, qui contrevient aux objectifs climatiques et environnementaux de la Région ?

L’un des problèmes importants – ce n’est pas le seul – de ce traité est la fameuse sunset clause, une clause de sauvegarde qui protège les investissements et donc les investissements fossiles, durant encore 20 ans, même en cas de retrait. Cela peut poser question en matière de démocratie et de compatibilité avec d’autres engagements internationaux, tels que nos objectifs climatiques.

Avez-vous étudié la possibilité juridique de contester cette clause  ou pris connaissance d’analyses allant dans ce sens ?

Je vous remercie d’avance pour vos réponses

M. le Président. – La parole est à M. le Ministre-Président Di Rupo.

M. Di Rupo, Ministre-Président du Gouvernement wallon. –

Monsieur le Député, les négociations pour la modernisation du Traité sur la Charte de l’énergie ont été closes à la fin juin. Le texte dit « modernisé » sera soumis à l’adoption de la Conférence le 22 novembre. Le Conseil de l’Union européenne doit se prononcer sur son soutien au texte avant cette date.

À cette fin, des réunions de concertation intrabelges ont eu lieu. La Wallonie y a salué le travail de la Commission européenne pour moderniser le traité. Toutefois, ce que l’on appelle la modernisation est en dessous de nos attentes et insuffisante sur au moins deux aspects :

  • les objectifs climatiques ;
  • les procédures de règlement des différends par arbitrage privé entre investisseurs privés et l’État.

Le traité dit « modernisé », qu’il le soit ou non, ne correspond pas à notre Déclaration de politique régionale. Nous avons donc demandé, au nom de la Wallonie, une sortie concertée du traité. Cette sortie peut se faire via l’Union européenne ou un groupe d’États. Toutefois, d’autres entités belges défendent le traité modernisé. À ce jour, il n’y a pas eu de consensus. Par conséquent, dans un cas pareil, la Belgique s’abstient sur le dossier au Conseil européen dans les diverses discussions. Les discussions se poursuivent cependant de manière intrabelge. Tant qu’il y a des discussions, il y a toujours de l’espoir, mais on verra un peu si l’on peut aboutir à un consensus. En tout cas, notre point de vue est qu’il faut en sortir.

La question de la clause de sauvegarde est pertinente. En réunion intrabelge, il a été demandé que la Commission analyse la situation. Elle doit évaluer les conséquences d’une sortie concertée du traité. Cette étude portera, entre autres, sur la neutralisation de la clause de sauvegarde.

Monsieur Bierin, je sors un peu de mon rôle – ce qui est rare –, mais vous avez raison. Quand, pour 20 ans, on soutient les énergies fossiles, il y a quand même un problème. Parfois, on a l’impression que l’on ne vit pas sur la même Terre et que certains ont l’esprit sur Mars, comme Elon Musk.

M. le Président. – La parole est à M. Bierin.

M. Bierin (Ecolo). –

Je vous remercie pour cette position claire et volontariste de la Wallonie.

Avec diplomatie, vous n’avez pas voulu pointer du doigt des homologues d’autres entités fédérées, mais soyons clairs, c’est la Flandre qui bloque une position unanime de la Belgique sur la question.

On pourra aussi agir de façon informelle auprès de différents acteurs de la société civile ou de l’opposition en Flandre pour essayer d’infléchir cette position malheureuse du Gouvernement flamand.